mercredi 2 mars 2011

L'enfant et la poussière

Sur la route de Tripoli, un enfant. Un soldat. Un voyou. Il marche, tête baissée, envoyant voler des cailloux. Il serre dans sa main un vieux foulard rouge. Taché. Du sang de son père, peut-être.

Il ne comprend pas cette révolution. Presque rien. Que la colère. Et ce désir de liberté. De sentir qu'il a le droit de devenir.

Il entend au dessus de sa tête passer les avions. Des puissances contre lesquelles il voudrait se battre. Se lancer sur ces géants comme d'autres se sont écrasés sur des chars d'assaut.

Ses sandales sont brisées. Il n'a aucun bagage. Que ses vêtements lourds de poussière. Il ne pense pas au retour. Atteindre seulement la ville.

Dans sa tête résonne l'écho des cris. L'appel aux armes. Le chaos. De l'eau salée trace des sillons sur son visage. Son ventre se noue. Il avance toujours.

Ses yeux noirs scrutent l'horizon. Des camions passent près de lui sans ralentir.
À quel camp appartiennent-ils? Sauter à bord ou leur lancer des pierres?

Sur la route de Tripoli, un garçon mesure son impuissance. Il atteindra son but la nuit tombée, sous une pluie de missiles. Qui remarquera sa rage?

Et qui regardera son visage blessé, quand il viendra mourir contre les remparts de la vieille ville?

Amélie Charest

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